Article rédigé le 25 février 2018 , mis à jour le 11 novembre 2023
Les fireflies sont des lucioles. On les appelle aussi « ligthning bugs » (littéralement, « insectes qui font de la lumière »). On en trouve un peu partout dans le monde, mais il est un phénomène hyper rare : leur vol simultané/synchronisé (le « synchronous fireflies »), qui n’existe que dans quelques lieux (répertoriés) du globe. Et le plus célèbre et aux Etats-Unis, au coeur du Great Smoky Mountains National Park.
Imaginez des milliers de lucioles qui scintillent en même temps à la nuit tombée en une pluie de lumière. C’est leur parade nuptiale, leur grand-messe d’accouplement, qui ne dure que quelques jours (deux semaines à peu près). Pourquoi et comment les lucioles s’allument ? C’est un peu compliqué mais c’est par bio luminescence, une réaction chimique dans leur abdomen entre plusieurs composants de leur corps. Romançons un peu : en gros, les mâles volent et clignotent un max pour attirer les femelles (qui, pour la plupart, ne peuvent pas voler). Ces dernières, installées tranquilles dans les arbres, se mettent à scintiller à leur tour lorsqu’un mâle (vraisemblablement celui qui envoie le plus de lumière), leur plaît. Après ce ballet bioluminescent, ce feu d’artifice lumineux, vient le moment tant attendu de l’accouplement. Les lucioles (en tant que telles, à l’âge adulte) ne vivent au sens propre que le temps de ce moment (une vingtaine de jours) et de la production des larves, qui donneront naissance à la génération suivante. Et ainsi de suite. Tout se passe de nuit, et c’est là qu’elles sont visibles.
On a (évidemment !) découvert le phénomène aux Etats-Unis, lors de notre premier passage dans les Great Smoky Mountains (Tennessee, Caroline du Nord). Au hasard de recherches, on a découvert que le parc national éponyme organisait une poignée de soirées « fireflies » pour observer cet événement naturel si rare. On a absolument voulu y aller. Le hic, c’est que l’événement attire tellement les foules que le parc a lancé un système de loterie pour y participer, qu’on a bien sûr perdue (on n’a jamais trop de chance aux trucs de hasard). Du coup, on a fait ce qu’on fait encore plus rarement : fait une demande très officielle, au nom du blog, auprès de l’administration du NP. Cela a été galère, le temps d’arriver au bon interlocuteur, mais on y est arrivés et on a décroché notre précieux sésame. La soirée, après une journée de pluie et dans l’obscurité, a été épique, mais on n’oubliera jamais le spectacle qui s’est joué devant nos yeux, ni cette ambiance si particulière. Par le passé (outre les vers luisants de notre enfance en France, qui n’étaient que deux max dans le jardin), on avait déjà eu l’occasion de voir des poignées de lucioles américaines, dans le Vieux sud, au parc national de Congaree… Mais rien à voir avec ce ballet magique, réputé mondialement pour sa féérie, souvent classé numéro 1 en la matière.
En voyage en Asie pour la première fois, aux Philippines, on a eu l’occasion de croiser une nouvelle fois la route des fireflies. C’était magique, mais très différent. Cela nous a donné envie de nous repencher sur ce phénomène et de le partager. Voici nos conseils pour, vous aussi, en voir.
Les hot spots des fireflies aux Etats-Unis
Il n’y a pas de vols synchronisés partout. On liste aussi les endroits où l’on peut voir des lucioles « tout court ». Aux Etats-Unis, il n’y en a que (grossièrement) la moitié Est du pays (majoritairement au sud-est) qui accueillent des lucioles. Avec les années, le réchauffement climatique, la donne peut changer un peu. Le plus grand ennemi des lucioles : la pollution… lumineuse.
Il existe plus de 2000 espèces de lucioles ou lampyres, des coléoptères qui émettent des couleurs différentes (jaune, vert…) par bioluminescence, mais il y a cinq « familles » principales. Aux Etats-Unis on trouve surtout les Photonini (« simple » ou carolinus selon le secteur, dont le Great Smoky Mountains NP, ce sont eux qui clignotent de façon synchronisée), le phausis reticulata (surnommé le « fantôme bleu », du sud-est), le pleotaumus davisii au Tennessee, le tenaspus angularis autour du Golfe, le photuris frontalis au Texas (en vols synchronisés), le pollaclasis (Mississippi), le rare photinus knulli (à Cajon Bonito, Arizona), en Virginie occidentale, dans le Delaware…
Voici une liste (non exhaustive) d’où les voir avec certitude, lors d’événements organisés. De nouveaux sont régulièrement découverts et officiellement reconnus.
Great Smoky Mountains NP, Elkmont (Tennessee)
C’est LE spot mondial pour assister au vol synchronisé des fireflies. Ça tombe bien, on l’a vu ! Comme on le raconte plus haut, il a fallu un heureux concours de circonstances pour qu’on y soit à ce moment là et qu’on y assiste. C’était le 4 juin 2016.
Le haut-lieu de l’accouplement féérique des lucioles se trouve dans le parc national des Great Smoky Mountains, dans le secteur d’Elkmont et sur le territoire de l’état du Tennessee (donc plutôt côté nord-ouest du parc, vers Gatlinburg). L’engouement pour phénomène est tel que le National park service a instauré un système de loterie en ligne pour « trier » les participants sur le volet. Elle n’est lancée que quelques jours avant et, si vous gagnez, elle donne droit à un pass pour le parking (il faut payer 2,75 dollars). Le rendez-vous est donné en fin de journée au visitor center de Sugarlands et un service de navettes est mis en place (avec les trolleys du parc) pour transférer les participants jusqu’au sentier, à 6 miles de là. La file d’attente peut être longue !
N’oubliez pas de vous munir d’un siège (surtout s’il pleut), d’une lampe-torche (à protéger d’un filtre rouge ou bleu pour ne pas gêner les insectes, ils donnent des petits morceaux de cellophane sur place, et à utiliser seulement le temps du transfert, lumière vers le bas), et de quoi grignoter/boire pendant l’attente. Et le matériel photo (trépied obligatoire, et c’est très difficile à immortaliser).
Il est maintenant temps de choisir son spot. On avait choisi un coin tranquille (il y a beaucoup de monde) pour avoir la meilleure obscurité, avec beaucoup d’arbres, pas trop loin du sentier principal. Une fois la nuit tombée, on a vu quelques petits flashs puis le ballet a commencé. Sincèrement, c’était magique. On ne s’est décidés à remballer que vers 22h30. On a repris le trolley puis notre voiture. Regardez la vidéo de Radim Schreiber ci-dessous.
Les lucioles à l’oeuvre ici appartiennent à l’espèce du « photinus carolinus« . C’est la seule des 19 espèces qu’on trouve dans le parc et en Amérique du nord capable de synchroniser ainsi ses lumières.
Le bon plan (si vous n’avez pas de pass) : dormir au camping sur place lors de la période (voire se trouver dans le secteur dès l’après-midi). Mais chut, on vous a rien dit.
Quand ? Le vol synchronisé des fireflies dure environ deux semaines, entre la fin mai et la mi-juin.Où ?Elkmont campground, Sugarlands visitor center, parc national de Great Smoky Mountains. Le Visitor Center est à 6 km de Galtinburg (12 minutes). Le camping d’Elkmont est à 10 km (15 minutes) du Sugarlands Visitor Center. Prix ?2,75 dollars le parking et 1$ par personne pour le trolley. Le parc national est gratuitSite du parc nationalSite de la loterie
Là aussi, on les a vus (fin mai, Memorial Day est un repère). C’était la fin de saison car elles avaient été en avance, moins féérique que le spectacle de Great Smoky (à 400 kilomètres de là) mais déjà magnifique. C’est la même espèce de lucioles qu’au Great Smoky.
Ici, pas de loterie mais un accès libre (attention, le parking est quand même limité). Rendez-vous au Harry Hampton visitor center (qui ouvre tard en saison). Ca se passe juste autour, sur le Bluff trail. Il y a même un festival. Le parc est très chouette et, pour une fois, se parcourt quasi exclusivement à pied (sentiers sur une rampe de bois) ou en kayak. Attention, c’est aussi la haute saison des moustiques !
Le prix : c’est gratuit (comme l’entrée au parc).
Quand ? Environ deux semaines, de mi-mai à mi juin (ces dernières années, plutôt de mi à fin mai)Où ? Au Congaree National Park, au Harry Hampton Visitor Center, 100 National Park Rd, Hopkins, Caroline du SudPrix ? GratuitSite du Congaree NPNotre roadtrip en live dans ce secteur Où dormir ? Sur place aux campings de Longleaf ou Bluff ou à Columbia, ville universitaire et dynamique à 30 minutes de route du Visitor Center
Allegheny National Forest à Tionesta (Pennsylvanie)
Cette colonie aussi a été repérée il y a quelques années (en 2012), dans la forêt nationale d’Allegheny, en Pennsylvanie. Cet état est fier de ses lucioles : l’insecte est même l’un de ses emblèmes (depuis les années 1970). Ici ce sont les carolinus qui clignotent, mais l’état répertorie aussi une espèce qui porte son nom : le photuris pensylvanica.
Le site d’observation est situé le long de la rivière, à Tionesta creek. Des visites guidées sont organisées le long du sentier et le nombre de participants est limité. Le site abrite aussi des « lanternes chinoises », des lucioles majestueuses (qui ne clignotent pas en synchronisé). Un festival leur est même dédié, le « PAFF » (Pennsylvania firefly festival). Il a lieu au Black Caddis Ranch B&B à Kellettville (le 24 juin en 2017, le 23 juin en 2018), près de Tionesta, à 200 kilomètres au nord-est de Pittsburgh et à l’ouest de la forêt nationale d’Allegheny.
Régulièrement complet, il est conseillé de réserver son hébergement le plus tôt possible
Quand ? De la mi-juin au 1er juillet. Au-delà de la journée de festival, le ranch organise des soirées pendant 15 jours.Où ? A Tionesta, Pennsylvanie. Prix ? 5 euros de parking le jour du festival. Places limitées pour les tours guidés mais possibilité de trouver un spot si c’est plein. Le site du festival et le FAQ du festivalOù dormir ? Voir sur le site du festival ou àMarienville
Blue Spring State Park (Floride)
Ce hot spot à lamantins l’hiver devient haut-lieu de l’observation des lucioles, au mois d’avril. Pour permettre au visiteur de les admirer, le parc étend ses horaires en soirée (mais les visiteurs du jour ne peuvent pas rester et doivent partir au coucher du soleil). Il faut arriver à 20 h, s’inscrire et obtenir un pass. Il est valable une heure jusqu’à la sortie (21 heures). L’observation est gratuite (ou en tout cas au prix normal de l’entrée du parc, 6 dollars par voiture). N’oubliez pas votre spray anti-moustiques.
D’après nos recherches, les fireflies seraient également visibles à l’Ichetucknee Springs State Park.
Quand ?En avril (fin mars-début avril)Où ? Blue Spring State Park, 2100 W French Ave, Orange City, FloridePrix ? 6 dollars par voitureLe site du Blue Spring State ParkOù dormir ? Possibilité de dormir sur place dans des cabins ou dans les villes proches, comme Orange CityouDeltona
Oak Ridge Wildlife Management Area (Tennessee, vers Knoxville)
Ce spot est récent (2015) et a une histoire rigolote. Un mec du coin, intrigué par le phénomène des vols synchronisés de lucioles, s’est mis dans la tête d’en trouver autour de chez lui, dans le Tennessee (la luciole est aussi l’insecte officiel de cet état). Il a réuni une équipe de volontaires (la « Firefly Team ») et ils ont écumé les forêts jusqu’à trouver le leur, à l’Oak Ridge Wildlife Management Area (vers Oak Ridge, non loin de Knoxville, Tennessee).
Ils ont même fait mieux, en trouvant une espèce différente : le « photuris frontalis« , surnommé le « Snappy Syncs ». Moins connu que le carolinus (mais déjà répertorié dans le sud-est américain), sa grande différence se trouve dans son clignotement (plus mais avec des pauses différentes…).
Quand ? Début juinOù ?Oak Ridge Wildlife Management Area, Oak Ridge, TennesseePrix ? GratuitAccès ? A ce jour, nous ne savons pas si le site est accessible pour aller observer les lucioles. Une association, Advocates for the Oak Ridge Reservation (AFORR), milite pour que le site devienne une réserve naturelle (« reservation »).Le site du parcOù dormir ?A Oak Ridge ou à Knoxville
Ailleurs dans le monde
On peut en fait voir des fireflies un peu partout dans le monde : en Amérique du Nord, du Sud, mais aussi en Asie et en Europe (apparemment en Italie). Tous ne sont pas des mêmes espèces et peuvent vivre dans des habitats différents mais ils ont un point commun : l’eau (de préférence stagnante) et le climat tropical, chaud et humide. Ils ne sont visible que de nuit.
Ils sont très présents dans les forêts de mangrove d’Asie du sud-est, en Malaisie (dans la région du Kampung Kuatan), à Kuala Lumpur (Kuala Selengor…).
Nous on en a vu aux Philippines, sur l’île de Bohol (mais il y en a sur d’autres îles). Notre resort organisait des tours en bateau (ou en paddle), alors on s’est laissés tenter (en se disant que ça paraissait si simple par rapport aux Etats-Unis qu’en était presque « décevant »). Le tour nous a coûté moins de 10 euros et ce qu’on a vu était tout simplement magique. On est parti sur notre bangka dans le noir complet. Notre capitaine, « armé » d’une lampe frontale, cherchait, cherchait dans les palmiers des bords de la rivière Loboc. On a vite compris qu’on les avait trouvés : le haut des arbres clignotait encore plus gaiement qu’un sapin de Noël ! On est restés longtemps à les regarder. C’est très différent du spectacle américain, mais tout aussi féérique. Et ici, le ballet de lumière dure à l’année.
Tips photos and co
Rien (ni en photo ni en vidéo) ne peut retranscrire parfaitement le ballet lumineux des fireflies synchronisés. Mais on peut quand même tenter de les immortaliser.
Notre conseil photo : armez-vous d’un trépied, d’une télécommande, montez les ISO un max, enclenchez le mode manuel, enlevez l’auto-focus et le stabilisateur, réglez l’ouverture au maximum (le plus petit chiffre, par exemple F4) et choisissez un long temps de pose (10 secondes et plus). Le rendu : de petites taches de lumière et parfois le vol séquencé des lucioles.
N’oubliez pas d’éviter de produire toute sorte de lumière (couvrez votre lampe torche d’un filtre rouge ou bleu) et, surtout, ne touchez pas les lucioles et ne les attrapez pas (les petits Américains ont l’habitude de les mettre en bocal, mais c’est interdit). Entre les pesticides et l’accroissement de la pollution lumineuse qui s’étend, il n’est pas sûr que les générations futures puissent connaître ce magnifique spectacle. Ce serait bien qu’on leur en garde un peu 🙂
Vous connaissez d’autres super spots aux Etats-Unis ? Partagez-les avec les autres Roadies en commentaireSources : Firefly.org, Quora.com, Museum of Science, National Geographic, Great Smoky Mountains NP. Voir aussi les photos et des vidéos de Radim Schreiber, un photographe tchèque expatrié aux Etats-Unis, devenu spécialistePhotos Lost in the USA (sauf la dernière Deposit photos)